Comment la marque qui produit ces petites caméras aurait-elle dû réagir ?
Alors que le grand public se demande désormais si GoPro est vraiment responsable, la marque fait l’erreur de ne pas communiquer. Comment le comprendre alors qu’elle ne peut pas sérieusement espérer que cela s’étouffe ? Le danger est pourtant considérable pour la marque. D’abord parce que l’image de GoPro est dores et déjà écornée. Ensuite parce que la confiance des investisseurs en la marque est manifestement atteinte. Ils ont besoin d’informations. Ils ont besoin d’être rassuré. C’est légitime. Déjà, la marque n’avait pas réagi alors que les affaires Merah ou Nemmouche avait durablement associé ses produits à des drames commis par des criminels.
Associer son image à celle d’un danger
Mais là, c’est une toute autre affaire, qui pourrait se ressentir sur les ventes. Car GoPro cible particulièrement les amateurs de sports extrêmes. Et sa mise en cause, même erronée, dans l’accident de Schumacher pourrait associer son image à celle d’un danger. Depuis des semaines, des rumeurs circulaient sur Internet concernant la responsabilité de la marque dans l’état de santé du septuple champion du monde. En effet, de nombreux sites internet ont diffusé l’information selon laquelle le produit de la marque porté par
Schumacher lors de son accident était, au mieux responsable de son état de santé, au pire l’un des éléments aggravant de son accident.
Evaluer l’impact réel d’une rumeur
Alors, c’est vrai, il faut avant tout évaluer l’impact réel d’une rumeur afin de ne pas réagir de façon disproportionnée à la moindre information malveillante, sauf qu’en l’occurrence, les signaux faibles étaient si nombreux qu’aucun doute n’avait lieu d’être ici. La viralité de l’information associée à la multiplication des supports reprenant l’information aurait dû déclencher la prise de parole de la marque.
Au cœur de la crise GoPro, il y a finalement avant tout l’absence de communication de crise. L’absence d’anticipation des risques est devenue socialement inacceptable. La marque doit donc tout mettre en œuvre pour expliquer que l’accident ne peut en rien être attribué à une négligence qui lui est imputable. L’absence de réaction de la marque démontre en tous les cas qu’elle n’a pas bâti de stratégies d’anticipation ou de réponse à la crise qui soient susceptibles de rassurer ses publics.
Le démenti s’imposait ici dès ce weekend
Le démenti s’imposait ici dès ce weekend. Vu le contexte émotionnel, sa rédaction devait être particulièrement empathique mais être très claire afin de ne pas laisser la possibilité au doute de s’installer. L’humour, l’autodérision, la campagne de rappel ou le recours judiciaire ne paraissent pas ici des scénarios intéressants pour sortir de la crise que traverse la marque. GoPro aurait dû prendre la parole. Un communiqué faisant office de démenti officiel pouvait efficacement être publié pour minimiser les impacts négatifs de la diffusion de cette rumeur. La marque pouvait ainsi y expliquer pourquoi sa direction souhaite réagir fermement à la rumeur qui tend à faire croire qu’il pourrait y avoir un lien entre son produit et l’accident du pilote. L’entreprise aurait également utilement pu y décrire à quel point elle est bouleversée que de tels propos puissent être véhiculé sur ses produits. Il aurait également été intéressant que la marque nous explique brièvement ses procédures ou ses investissements lourds pour garantir la sécurité de ses produits. GoPro pourrait aussi officiellement s’appuyer sur les rapports officiels qui tendent à exonérer la responsabilité de son produit. Elle pourrait aussi rappeler que l’enquête pénale la concernant a été classée sans suite.
Tous ces éléments sont importants parce que plus GoPro manifeste naturellement ses efforts pour empêcher la diffusion de cette information erronée, plus les consommateurs seront tentés de la croire et de continuer à faire confiance à ses produits. La marque aurait d’autant plus dû réagir que ce n’est pas l’industrie de la caméra miniature qui est mise en cause en l’espère, comme cela aurait légitimement pu être le cas, mais bien sa marque. C’est donc la relation de confiance tissée avec le consommateur qui est directement impactée. A l’heure du soupçon généralisé, le droit à la communication défaillante n’est plus permis.
A propos des auteurs : Florian Silnicki est expert en stratégies de communication et Sébastien Chenu est consultant en communication politique, ex-Directeur de la stratégie de France 24 et conseiller du Délégué interministériel du SIG.